Un retour subjectif et émouvant de la Master Class de Tom Carlson.
En avril dernier, j’ai lu l’histoire du chiot de Tom Carlson dans Errances narratives. Seule dans mon bureau de mon ancienne vie de thérapeute narrative j’ai pleuré en lisant son récit. Que se passait il dans mon corps à ce moment là, ce matin-là, dans la belle lumière d’’un matin ensoleillé? Qu’est ce que mes larmes disaient à mon esprit/corps/âme ce matin là?
Elles disaient « la communauté narrative te manque, tu es comme un oued asséché qui n’a pas reçu la pluie depuis trop longtemps. Tu souffres de solitude car tu es tellement engagée dans le monde des gens sourds qui n’ont pas d’yeux pour voir, pas d’oreilles pour entendre et pour qui tu transformes tes mots, tes intentions pour qu’ils les entendent… que tu te sens séparée, incomprise. »
Mon coeur se dilatait d’amour pour l’enfant au chiot, pour le thérapeute, inconnu de moi, capable de voir l’espoir là ou personne ne l’avait vu, pour moi même qui sait si bien rendre les chiots visibles dans la vie de mes clients, et pour tous « mes chiots » qui n’avaient pas été honorés depuis de longs mois.
C’est à ce moment là que j’ai décidé de m’inscrire à la Master Class de Tom CARLSON en septembre. Je voulais juste retrouver ma communauté narrative, sans rien en attendre de plus qu’une pluie bienfaisante.
Après deux ans passés presque intégralement dans le monde « normal » du business, je me suis retrouvée baignée pendant ces deux jours dans le « loving people world » . Le monde des gens qui aiment,… Whaou !
La vie dans ce monde là est si riche, si extraordinaire, que j’en repars transformée encore un peu plus. Thank you Tom, Elizabeth, Sanni, et tous les autres…
Je n’ai certes pas découvert le corps, je travaille depuis là, en empathie corporelle et émotionnelle avec mes clients depuis des années, mais j’ai reçu, encore une fois, tellement d’amour et partagé tellement l’amour de Tom pour Miranda, Marsha, Lynn et tous les autres.
Et puis j’ai approfondi ma compréhension de la puissance des conversations par procuration et mis un mot sur ce que je ne nommais pas mais appelais à la rescousse si souvent: la contre histoire et le « moral character »…Merci David et Tom de théoriser cela pour nous le transmettre.
Ces deux dernières années dans le monde des « non-loving people » j’ai beaucoup appris aussi ! Tom a dit « comment définir la thérapie narrative en une minute ? C’est tellement difficile »…
Moi ça fait 2 ans que je dois découvrir comment « pitcher» mon projet d’entreprise narrative devant des parterres de business men, de banquiers, de clients potentiels, d’organismes publics, de journalistes…. Et chaque fois ils cherchent à comprendre cette « idée poétique » pour la transformer en quelque chose qui a du sens pour eux, qu’il peuvent rapprocher d’un truc qu’ils connaissent déjà.
Alors ils posent des questions : Mais quel est ton « business model »; à combien est le « point mort »? Quels sont tes « produits » B2B ? Quelle communication B2C? Qui sont les cibles ? Comment les adressez vous ? Montre nous le tableau de bord de gestion…Prouve, Convainc, qui es tu pour croire que tu peux faire ça ? Ne rêve pas ! On est pas dans un monde de bisounours… Ici c’est du sérieux !
On ne va pas parler d’amour quand même??? Alors que le projet n’est qu’amour et magie…
Le projet c’est juste de permettre à des hommes et femmes « retraité(e)s », maltraités car considérés comme « non productifs » voire pire, de (re)trouver un espace libre de dignité et d’amour dans lequel ils pourront bénéficier de la magie transformatrice de la narrative, sans autre considération que leur acte volontaire d’y être entré.
Alors que et que notre société dénie leur existence, veut les oublier, les cacher pour ne pas se confronter à sa peur de les voir vieillir, faiblir, devenir dépendants puis mourir, c’est un espace dans lequel ils peuvent se développer, s’enrichir, revisiter leur passé et leur avenir depuis une place où ils sont puissants et fiers et non pas depuis une place où ils sont honteux de leur faiblesse…
L’un de mes « chiots » préférés, c’est que certains d’entre eux (elles) s’engagent dans des projets de transmission grâce à cette transformation, pour faire savoir au monde « normal » que les « vieux et les vieilles » sont beaux et dignes si on les regarde comme tels ! Projet politique Sanni, n’est ce pas?
Depuis un an, j’ai ouvert à Nantes un premier espace dans lequel ces « minoritaires maltraités » rencontrent des hommes et des femmes qui ont des yeux pour voir la beauté, des oreilles pour entendre les mots même ceux qui ne sont pas dits, des corps pour ressentir et faire émerger les torrents d’amour parfois insoupçonnés qui circulent à l’intérieur…
et je veux que l’accès à ce monde là soit accessible au plus grand nombre, donc pas cher…Oui OUI OUI… vous imaginez la tête du monde « normal » quand je dis ça ?
Alors j’ai acquis un talent fou pour déguiser ma poésie et mes intentions, et j’ai déguisé à tous, (sauf mes salariés et intervenants) le vrai projet ! Ce qui m’amuse beaucoup en fait depuis ma place dans le monde des gens qui aiment.
Je suis un lutin farceur qui sait très bien mettre son costume de business quand il faut, de thérapeute reconnue quand nécessaire, de femme de réseau influente ( et pas décentrée du tout… private joke for Pierre ! ), de spécialiste toute catégorie auto-proclammée à chaque fois que nécessaire… pour convaincre un sourd ou un aveugle de faire ce dont j’ai besoin pour avancer, progresser vers la matérialisation de cette utopie poétique…
- Oui je suis dans la « silver économie » celle des « cheveux argentés » et de « l’argent $» !
- Oui j’ai des plans de communications efficaces qui épousent les codes des conventions pour être attractifs et faire venir clients !
- Oui j’ai une stratégie commerciale et des « produits » à vendre aux entreprises pour les amener à cofinancer mes projets condition indispensable pour rendre l’accompagnement accessible aux petits budgets de mes clients et payer mes intervenants…
- Oui j’ai des comptes de résultats, des bilans, des chiffres et des mesure de ROI… ( catastrophiques pour l’instant mais tout est sous contrôle… on est dans le « trend …
- Oui je respecte mes obligations d’employeur en matière sociale, fiscale, environnementale, comptable….documentale, risquable, et patatrable…
Ouf! et heureusement derrière tous ces déguisements, ces ruses et ces « petits aménagements » avec la vérité , il y a l’amour et l’accès à la magie de la transformation narrative !
L’expérience partagée de voir des personnes qui s’épanouissent dans ce terreau fertile, simplement parce qu’elles sont regardées, écoutées, par des « personnes qui aiment ». Au contact de nos corps qui ressentent, regardent, écoutent et questionnent, elles se redressent, retrouvent leur dignité, et se reconnectent avec l’amour, même si elles n’ont pas toutes les mots pour le dire.
Elles sont respectées dans leurs fragilités, leurs timidités, leurs envies qui n’osent pas encore se dire, comme des chants d’oiseaux qui ne sont pas encore sûrs du rayon de soleil qu’ils souhaitent célébrer par leur chant. Une fois qu’elles sont là, sans le savoir consciemment, elles intègrent notre grande famille de ceux qui bougent et se transforment grâce à la poésie, la beauté, la dignité. Elles retrouve la présence qui les rend capables de (re)voir parce qu’elles ont des yeux et des oreilles ouverts à la magie transformatrice des mots et des histoires.
Et, cerise sur le gâteau, aujourd’hui, depuis cette place, je peux vous dire à vous, sans la déguiser, l’ambition invraisemblable qui me porte dans la réalisation de ce projet. Ça me semble une magnifique proclamation. Merci de l’avoir lue.
Extraordinary isn’t it? With Love
Sandrine