Suite à la conférence donnée le 24 mai dernier au Forum 104, je partage les points essentiels de mon propos. Coach spécialiste des transitions de carrière et de la reconversion, je vous propose ici une transmission par le témoignage, qui allie pratique et théorie.
Quand les personnes viennent demander un accompagnement à la reconversion, ils viennent avec des histoires. Dans le cas de la reconversion, ce sont des histoires de leurs expériences professionnelles reliées en séquences, situées dans le temps avec un thème prédominant : cela ne leur convient plus. Il est fréquent que ces thèmes reflètent la souffrance, le sentiment d’incompétence, le désespoir, la dévalorisation. Les événements créent une histoire de problème que l’on pourrait nommer « Insatisfaction ». Tout l’enjeu de l’accompagnement sous l’angle de la narrative est d’engager des conversations pour redevenir auteur.e. Ces conversations autour d’événements uniques constituent le point de départ de la reconstruction / reconversion. Et pendant que ces conversations se conduisent, l’histoire alternative s’étoffe et fournit aux gens une base pour prendre de nouvelles initiatives.
LE DESIR DE RECONVERSION COMME ACTE DE RESISTANCE
Cela commence dès l’entretien exploratoire : les personnes qui viennent à nous sont des résistants, au sens Jean Moulin. Elles défendent des valeurs fortes. L’un des points clé dans l’accompagnement des personnes en désir de reconversion est d’honorer leur parcours, leur histoire jusqu’à cet acte de résistance. Cela passe par :
- reconnaître la difficulté
- conscientiser les stratégies mises en place pour tenir jusque-là : il est fréquent que se cachent derrière ces stratégies des histoires de courage, d’honneur, d’excellence
- déconstruire l’influence du problème : burn-out, démotivation
Au paysage de l’action et de l’identité, s’ajoute le paysage du corps, protagoniste très présent lors des accompagnements.
L’ACCOMPAGNEMENT A LA RECONVERSION EST UNE METHODOLOGIE DE L’ESPOIR
Demander un accompagnement avec l’idée de se reconvertir, c’est se tourner vers l’avenir, pour voir son problème de beaucoup plus loin. C’est faire grandir la possibilité d’une histoire singulière dans un contexte dominant : celui d’un système basé sur la performance et la compétition.
Le travail narratif ne propose pas de solution miracle ou formule inédite et on ne cherche pas forcément à résoudre le problème.
Ce que l’on cherche, ce sont d’autres histoires : les histoires préférées.
RECONVERSION : DE L’HISTOIRE DE PROBLEME AUX HISTOIRES PREFEREES
Quand les gens viennent avec un désir de reconversion, il y a déjà une histoire alternative en place. Très mince, pas assez étoffée mais elle est là. Attention toutefois : il faudra valider que c’est bien une histoire préférée et qu’elle leur convient.
Ils en ont marre de leur boulot et pensent à trouver autre chose. Quelque part, c’est qu’ils nourrissent une histoire qu’autre chose est possible.
En reconversion, on travaille très peu sur l’histoire du problème : l’insatisfaction au travail. On se connecte directement aux histoires préférées, celles du passé et celle pour l’avenir.
En revanche, il arrive souvent qu’on travaille sur des histoires de problèmes sous-jacentes et qui apparaissent au cours de l’accompagnement. Il y a, par exemple, une invité(e) spéciale chez beaucoup des clients à la reconversion, qui est Dame Dévalorisation.
RECONVERSION : DES HISTOIRES DE COMPETENCES ET DES HISTOIRES DE PROJETS
Les accompagnements à la reconversion qui durent entre 4 mois et 1 an se font en 2 temps.
On travaille dans un premier temps sur des histoires de compétences :
- compétences professionnelles
- compétences personnelles
- compétence à définir sa propre vision de la réussite
- compétence à reconnaître ses besoins
Dans un second temps, on en vient à travailler sur des histoires de projets.
À partir du moment où une nouvelle histoire, plus séduisante, commence à émerger, le praticien va chercher comment aider la personne à s’y « cramponner », à rester en lien avec l’histoire. En reconversion, cela passe par les enquêtes métiers et à la connexion à un réseau. Le témoin extérieur est un formidable outil pour épaissir une histoire préférée ou piste.
LA RECONVERSION ET LA NARRATIVE : UNE METHODOLOGIE SOUPLE
Il n’y a, dans l’accompagnement à la reconversion mené par la narrative, aucune stratégie d’entretien systématique ou de méthodologie stricte.
L’enjeu est de rester fidèle à la posture décentrée et influente : je suis, pour ma part, mes clients dans leurs narrations et sujets d’attention. Je guette les fines traces, j’engage des conversations autour des exceptions et nous créons ainsi, ensemble, les fondements de la reconstruction et de, s’il convient, la reconversion.
A très bientôt.